Eh oui, l’argent est bien un sujet qui n’est pas spécial à notre réalité printanière, mais qui, pendant le confinement, peut prendre un relief particulier.
Nous sommes très diversement impactés ces jours-ci par les questions d’argent : ceux qui travaillent « comme d’habitude », de chez eux ou sur leur lieu d’emploi habituel, ceux qui sont en chômage partiel, les indépendants qui ont vu s’arrêter toute rentrée d’argent… ne sont pas logés à la même enseigne… Dans la sérénité comme dans l’inquiétude, le confinement ne nous dispense pas de remplir le frigo et de devoir régler nos dépenses !
Or l’argent peut être entre nous un sujet délicat, voire un sujet qui fâche. Mais dans « la vie d’avant », n’était-ce pas déjà le cas ?
Vous savez, l’argent est une donnée apportée dans de nombreuses problématiques de couples que je rencontre en consultation. Trop d’argent (oui, ça arrive), pas assez, mais surtout une gestion de celui-ci très différente entre les deux conjoints, source potentielle de conflits récurrents.
Et la gestion matérielle de nos biens et de nos dépenses dit évidemment quelque chose de notre fonctionnement de couple !
La source de cette question d’argent se trouve bien évidemment dans mon rapport personnel à celui-ci : ma manière d’appréhender l’argent, on le sait, reflète une partie de ma personnalité, et aussi mon éducation, mon milieu social d’origine, l’attitude face à l’argent chez mes parents, mes manques éventuels dans l’enfance… Je pense à ce couple rencontré récemment : madame gagne sa vie comme coiffeuse. Pour elle, l’argent qui rentre peut être dépensé, c’est son rôle, comme une voiture sert à transporter les personnes ; monsieur, lui, a besoin d’économiser, d’être assuré d’un suffisant( ?) matelas financier pour se sentir en sécurité. Lui, dans son enfance, a connu une grande précarité… L’attitude de sa femme le plonge donc sans cesse dans l’insécurité, qui se traduit par un contrôle constant, et des reproches…
Nous reconnaitrions-nous dans une des phrases ci-dessous ?
Tu as encore acheté ceci… Avions-nous besoin de cette dépense ?
Tu mets en péril notre équilibre financier
Tu ne parles que d’argent, pour toi il n’y a que cela qui compte
Tu es vraiment radin ou tu jettes l’argent par les fenêtres
Etc…
Des divergences possibles, donc, qui ne sont pas nées tout d’un coup, puisque ce rapport à l’argent a préexisté à notre couple. Est-ce que je m’efforce de comprendre le fonctionnement interne de mon conjoint ?
Est-ce que j’accepte de le voir comme une part de lui/elle ?
Nous avons sans doute établi à l’amiable des règles de fonctionnement, implicites ou explicites :
Compte commun ou séparé? Qui gère quoi ? L’un assume l’intendance, l’autre le chauffage ou les études des enfants… Comment avons-nous distribué les rôles et les tâches au sein de notre couple ?
Y a-t-il transparence sur cette question de revenus ?
Est-ce que la gestion que nous avons mise en place au début de notre vie de couple est toujours la meilleure pour nous ?
Est-ce qu’aujourd’hui elle correspond toujours à nos besoins et à nos possibilités respectives ? N’y a-t-il pas des points à réexaminer, réévaluer, modifier ?
Est-ce qu’un des deux pourrait se sentir lésé, voire exploité par l’autre ?
A FAIRE EN COUPLE. De ces questions, comme de bien d’autres, il faudrait évidemment pouvoir parler à deux. Est-ce possible dans notre couple, sans tensions ni disputes ? Ou s’agit-il d’un de ces « sujets qui fâchent », tant de fois mis sur tapis qu’on hésite à en rouvrir le dossier ?
Une bonne occasion de communication, que nous aurons à cœur de préparer afin qu’elle ne génère pas un conflit ouvert, ou fasse ressortir de vieux griefs…
Nos manières de gérer les questions matérielles, je l’ai dit, sont quelque part un reflet de notre fonctionnement de couple. Qui décide ? Qui tranche ? Qui paie ? Et si l’un des deux a un salaire bien plus élevé que l’autre ? Comment le vivons-nous ? Comment en parlons-nous ? Derrière cette dernière question, en effet, se cache celle du pouvoir dans le couple. Ce sera l‘objet d’une prochaine chronique !